Je vous parlais dans un article précédent du conflit parents-enfants, assez bien documenté dans le monde animal mis à part chez l’humain. C’est d’ailleurs une question toujours ouverte de savoir s’il se produit réellement dans notre espèce, même si certains indices nous laisseraient penser que c’est le cas.
En cherchant un peu, je suis tombé sur cette étude de Schlomer et Ellis, publiée il y a deux ans dans le Journal of Research on Adolescence et qui vient ajouter un peu d’eau au moulin. Rappelez-vous, la théorie du conflit parents-enfants nous dit que parce la mère partage autant de gènes avec chacun de ses enfants (50 %, l’autre moitié venant du père), et parce que l’enfant partage plus de gènes avec lui-même (100 %) qu’avec ses frères et soeurs (50%), on devrait aboutir à des conflits dans lesquels chacun des enfants voudrait tirer le plus possible de couverture à lui au détriment de ses frères et soeurs (pour une explication plus développée voire l’article original).
Une façon de tester cette hypothèse chez les humains est de faire varier la similarité génétique entre frères et soeurs pour voir si cette variation influe sur la quantité de conflit entre mère et enfant. Mais comment faire cela ? Tout simplement en s’intéressant aux familles recomposées, dans lesquelles des demi-frères (ou demi-sœurs) vivent avec la même mère biologique mais un père biologique différent. La mère possède toujours en moyenne 50 % de ses gènes dans chacun de ses enfants, mais les demi-frères ne possèdent plus qu’une similarité génétique de 25 % entre eux, parce qu’ils n’ont pas le même père. Dans le cadre de la théorie du conflits-parents enfants, on s’attendrait donc à ce qu’il y ait plus de conflits mères-enfants dans les familles recomposées.
C’est ce qu’ont testé Schlomer et Ellis en suivant 236 pré-adolescents et leur mère et en les interrogeant sur leurs relations avant et après la naissance d’un nouveau petit frère, ou avant et après l’introduction d’un demi-frère à la maison. Les chercheurs évaluent le conflit parents-enfant par un questionnaire contenant 20 questions du type « Ma mère a l’air de toujours se plaindre de moi » ou « On se dispute au moins une fois par jour ».
Résultats : la naissance d’un frère (de même mère et même père) augmente le taux de conflit entre la mère et son enfant, conformément à ce que prédit le conflit parents-enfants. Mais de façon plus intéressante, l’introduction d’un demi-frère augmente de façon beaucoup plus importante les conflits entre mère et son enfant. Un résultat en accord avec les prédictions de la théorie du conflit parents-enfants, et qui tient toujours une fois contrôlée l’importance de certains paramètres comme le statut socio-économique ou la présence du beau-père à la maison.
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