Mettons les féminismes darwiniens en avant !

Voilà quelques travaux de féministes darwiniennes, féministes pas repoussées par les recherches en biologie du comportement et qui n’ont pas de problème à envisager que la biologie puisse expliquer en partie certaines différences comportementales hommes / femmes. Donnez-leur de la visibilité !

On commence avec les classiques et « La femme qui n’évoluait jamais » de la sociobiologiste Sarah Blaffer Hrdy. Dans ce livre, Hrdy évoque ses travaux sur l’évolution de la sexualité des femelles (le focus ayant trop souvent été mis sur les mâles). https://www.decitre.fr/livres/la-femme-qui-n-evoluait-jamais-9782228895101.html#resume

Si vous êtes pressé·e·s, vous pouvez simplement lire la préface de l’édition de 1999 dans laquelle elle revient sur la réception de ses recherches et de son livre (préface aussi très bien à faire lire en cours).

Hrdy alerte depuis un moment que les recherches en biologie de l’évolution sont importantes et devraient être mieux prises en compte par les féminismes. Ses conseils sont toujours d’actualité, les réactions passionnées dominant toujours les débats vingt ans plus tard.

Toujours dans les classiques, Barbara Smuts et son « Les origines évolutionnaires du patriarcat », dans lequel elle fait un tour d’horizon des espèces de primates où de la domination masculine est présente. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/24202828/ et aussi https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/24222394

Ce tour d’horizon ne la conduit nullement au pessimisme, puisqu’elle conclut :

D’autres universitaires abondent, comme la biologiste Patricia Adair Gowaty, qui pense que ces recherches peuvent « aider les femmes et les hommes qui se battent contre l’oppression sexiste » (1992 https://link.springer.com/article/10.1007/BF02692240 et bouquin en 1997 : https://www.amazon.com/Feminism-Evolutionary-Biology-Boundaries-Intersections/dp/0412073617)

D’autres tentatives de réconciliation de la biologie de l’évolution et du féminisme suivront tout au long des années 90, citons par exemple la philosophe Elizabeth Grosz, « Darwin et le féminisme » https://doi.org/10.1080/08164649993317

ou la professeure d’études de genre Elizabeth A. Wilson , en introduction d’un volume spécial https://www.tandfonline.com/toc/cafs20/14/29?nav=tocList

Dans les années 90 fleurissent aussi les recueils de textes, écrits à la fois par des femmes et des hommes, reflets des préoccupations grandissantes de l’époque.

Une autre étape-clé sera la publication en 2005 de “Who’s afraid of Charles Darwin” de la philosophe Griet Vandermassen. Elle y fait un tour d’horizon des théories féministes et des résultats de la psychologie évolutionnaire, ce qui la conduit à conclure qu’évolution et féminisme ne sont pas incompatibles.

Petite citation extraite de ce livre (j’explique plus en détails pourquoi elle dit ça dans ma dernière vidéo https://www.youtube.com/watch?v=nQLBl01ufVg )

Elle alerte aussi sur la nécessité de ne pas prendre le comportement masculin comme le « standard », une tendance que l’on retrouve parfois chez ceux qui avancent des explications entièrement sociales des comportements.

Le parcours de Mme Vandermassen est intéressant parce qu’elle a commencé par être hostile à la biologie du comportement avant de devenir féministe darwinienne. Je la rejoins sur son conseil : lisez ces disciplines dans le texte si vous voulez vous faire un avis, pas de deuxième main !

Les résultats de ces disciplines sont souvent bien moins “problématiques” qu’on ne le dit : par exemple, les similarités cognitives hommes/femmes démontrées sont nombreuses, et quand différence il y a, le portrait est souvent moins flatteur pour les hommes ! (même si, je le répète une fois de plus, il est dangereux, et probablement vain, de faire reposer les combats pour l’égalité des sexes sur l’absence de différences)

Autre féministe, Carla Fehr nous fait part de son émerveillement d’entendre à la fac une théorie scientifique présenter les femmes comme actives, alors que dans son éducation on les lui avait toujours présentées comme passives et absentes. https://www.jstor.org/stable/41328897

Depuis les années 2000, tous ces sujets continuent à être régulièrement abordés dans les journaux et livres d’écologie comportementale / sociobiologie / psychologie évolutionnaire, par exemple Anne Campbell https://academic.oup.com/book/6116/chapter-abstract/149659577?redirectedFrom=fulltext ou Buss & Schmidt https://doi.org/10.1007/s11199-011-9987-3

Et quelques reviews : là https://psycnet.apa.org/record/2012-14784-010, là https://www.english.upenn.edu/sites/www.english.upenn.edu/files/articles/Brilmyer_2017_Darwinian%20Feminisms.PDF ou là : https://www.jstor.org/stable/40072927 (pas d’accord avec tout ce qui y est dit mais peu importe)

Vous apprendrez dans ces reviews que certaines féministes se servent (positivement) de Darwin depuis… Darwin et qu’il existe diverses nuances de féminismes darwiniens (mais ça, ça ne vous étonnera pas si vous êtes familiers des féminismes).

Alors, la biologie du comportement humain, une discipline anti-féministe ? S’il serait malvenu de dire que les rapports sont au beau fixe, la liste de féministes darwiniennes ci-dessus montre que ces tensions n’ont rien d’insurmontables. A minima, ces femmes méritent qu’on écoute ce qu’elles ont à dire. Et je n’ai bien sûr mentionné que quelques féministes (il y en a plein d’autres, désolé à celles que je n’ai pas mentionnées, je me suis concentré sur les classiques) parmi celles qui ont trouvé bon de prendre la plume. Nombreuses sont les chercheuses et chercheurs féministes dans ces disciplines, mais qui ne le clament pas haut et fort (allez dans les labos vous en rendre compte par vous-même !). Ce compte twitter met en avant les femmes travaillant dans les sciences comportementales évolutionnaires : https://twitter.com/WomEvoBehSci. Vous verrez qu’elles sont nombreuses, et que certaines n’hésitent pas à travailler sur des sujets que d’autres qualifient de « sexistes ».

Si ces féminismes existent donc bien, ils manquent par contre de visibilité. C’est pourquoi j’en parle dans ma dernière vidéo, et je continuerai à le faire dans mon prochain livre, que vous pouvez soutenir jusqu’à Noel par vos précommandes : https://fr.ulule.com/livre-homofabulus/

J’essaierai aussi de vous faire un jour une vidéo dédiée « féminisme et biologie du comportement humain », si j’arrive à trouver les bonnes personnes pour m’accompagner (vous pouvez me contacter). D’ici là, n’hésitez pas à donner de la visibilité à ces femmes.

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